Judy Blake
La défense des arts est une activité à laquelle beaucoup s’adonnent, mais de temps à autre, une personnalité telle que Carol Collicutt s’y distingue de manière exceptionnelle, au point de façonner la scène culturelle pour toute une génération d’artistes. Quiconque travaille dans les arts a une liste d’améliorations souhaitables, comme une plus grande pertinence, un meilleur financement ou un public plus large. Carol ne se contente pas de souhaiter ou, pire encore, de se plaindre. Elle agit pour obtenir ce qu’elle veut. Grâce à sa détermination sans faille et à sa conviction profonde que les arts ont leur place dans la société, elle a développé les compétences professionnelles et les ressources nécessaires pour engendrer des changements substantiels dans le milieu culturel, toujours à titre bénévole, sans rémunération.
Carol a contribué à la création de la Gallery Connexxion à Fredericton, un centre géré par des artistes, puis elle a siégé au conseil d’administration de cet organisme pendant 25 ans, dont 10 ans en tant que présidente. Grâce à une combinaison unique de programmation contemporaine et d’ateliers d’artistes, ce lieu s’est taillé une place unique sur la scène artistique locale. Sa gestion du projet Connexion à Sainte-Croix, à l’occasion du 20e anniversaire du centre, a été remarquable. Ce projet hors site, qui intégrait des œuvres d’artistes autochtones en tant que voix essentielles dans une exposition sur la colonisation, a été réalisé une décennie avant que cette pratique devienne en vogue.
Carol est une leader qui n’aime pas se faire dire qu’il faut accepter les choses telles qu’elles sont. Lorsque le Conseil des arts du Nouveau-Brunswick a été confronté à de sévères restrictions budgétaires et à des bouleversements organisationnels en 2016, elle en a assumé la présidence afin de préserver cet organisme de financement provincial indépendant et pendant quatre ans, elle s’est efforcée de redresser la situation. Elle y est parvenue grâce à l’établissement de partenariats avec des organisations acadiennes, autochtones et d’autres groupes culturels de la province. Un plan stratégique triennal a été mis en place et l’organisation a travaillé sur des objectifs concrets afin que toute la population de la province puisse profiter d’une forte présence culturelle.
L’une des principales initiatives de Carol a été sa participation au Groupe de travail du premier ministre sur le statut des artistes. Dès sa publication en 2021, le rapport de ce groupe de travail est devenu un document de référence décrivant les défis socio-économiques uniques auxquels sont confrontés les artistes de notre pays. Les 24 recommandations formulées dans le rapport concernent toutes les instances gouvernementales et jettent les bases d’un renouveau vers un traitement équitable des artistes pendant de nombreuses générations. Plus de quatre ans plus tard, le 6 juin dernier, la Loi sur le statut de l’artiste au Nouveau-Brunswick a reçu la sanction royale.
Voilà un bel exemple de stratégie de pression efficace. Elle aboutit à des résultats concrets, utiles aux artistes et à la population. Elle demande du temps. Elle demande de la détermination. Il faut savoir miser sur le long terme pour obtenir des changements importants et durables. Même si j’ai souligné ses plus grandes réalisations, il y a aussi toute cette multitude de petits gestes, comme animer une réunion ou une conversation ou simplement être présente lors d’un événement. Pour Carol, tous ces gestes ont leur importance. En tant que militante bénévole, elle est l’une des meilleures dans son domaine et de nombreux artistes ont bénéficié de ses efforts. Pour toutes ces raisons, Carol Collicut mérite le prix 2025 de défense des arts de la Fondation Sheila Hugh MacKay.
Alexandra Badzak, Gérald Beaulieu, Suzanne Hill, Jennifer MacKlem, Sarah Quinton
* Audio disponible en anglais seulement.